De 1938 A 1969


Remerciements


Dans les années 1990, Francis PLESSIER avait concocté le " Livre d'or " des Cigognes, en fait un album qui retraçait très succinctement l'histoire de l'Aéroclub au travers de divers documents : les statuts de 1938, un très court historique qu'il avait lui-même rédigé, des articles parus dans les revues aéromodélistes de l'époque et des photos. A partir de cette intéressante et utile démarche, peu après le décès de Francis PLESSIER fin 1995, j'ai demandé à un ancien du club, Jean-Claude FAYER, ingénieur navigant d'essais et adjoint au directeur du Centre d'essais en vol, d'essayer de reconstruire plus complètement l'histoire du club à partir de ses souvenirs, de ce " Livre d'or ", des bulletins INFO-CLUB diffusés depuis 1979 et de diverses informations ou documents retrouvés à l'occasion de l'exposition, organisée lors de la soirée du soixantenaire de l'association en 1998.
Une première mouture fut ainsi rédigée par Jean Claude FAYER et envoyée pour avis à Marcel FAGES, président juste avant Francis PLESSIER, ainsi qu'à Jacky DELCLOO, ancien secrétaire et ancien trésorier du club. Leurs remarques et les nombreux compléments permirent ensuite à Jean-Claude FAYER d'amender et de rectifier le document initial, afin de le rendre aussi exact que possible.
Cette histoire de l'Aéroclub des Cigognes reste cependant incomplète et présente certainement encore des inexactitudes. Nous présentons par avance nos plus sincères excuses aux futurs lecteurs et serons heureux de prendre leurs observations en compte pour l'établissement d'une édition ultérieure plus exacte de ce document. Ainsi pour faciliter son évolution, nous avons volontairement séparé la partie texte de la partie photos.
Merci à Jean-Claude FAYER, Marcel FAGES et Jacky DELCLOO pour l'élaboration de cette première version qui, j'en suis certain, sera suivie de beaucoup d'autres, puisque l'histoire de l'Aéroclub des Cigognes est loin d'être terminée !


Jean ROUSSEAU
Président de l'Aéroclub des Cigognes

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Les origines


L'Aéroclub des Cigognes a vu le jour deux ans avant le déclenchement de la seconde guerre mondiale. Il a été créé dans le grand élan de "l'Aviation Populaire", voulu et subventionné par Léo LAGRANGE, Ministre de la Jeunesse et des Sports au sein du gouvernement "Front Populaire", issu des mouvements sociaux de 1936. Son nom a été choisi en souvenir de la célèbre escadrille SPA 3, où Georges GUYNEMER s'est illustré durant la première guerre mondiale.
Ses statuts, établis en date du 21 février 1938 dans le cadre de la loi de 1901, ont été enregistrés le 10 mars 1938 par la Préfecture de Seine et Oise et sont parus le 17 mars 1938 au Journal Officiel. Les rédacteurs ont déclaré fonder une association "entre les personnes s'intéressant aux sports de l'air", qui s'adresse indistinctement "aux individus des deux sexes et de tous les âges", afin de développer en eux le goût de l'aviation, en particulier par la pratique du vol.
Les statuts précisent que :
les membres actifs se subdivisent en trois sections (les cadets jusqu'à 14 ans, les juniors jusqu'à 21 ans et les seniors), et paient un droit d'entrée de 10 francs, puis une cotisation annuelle (de 4 francs pour les cadets, 8 francs pour les juniors et 10 francs pour les seniors),
tous les membres s'encouragent à fournir un travail bénévole de 8 heures par mois,
l'activité des sections est prévue au sein de six groupes : modèles réduits, vol à voile, aviation légère, tourisme, parachutisme et ballon libre,
la section cadet "s'occupera plus particulièrement de l'éducation pré aérienne et des modèles réduits", la section junior "utilisera plus particulièrement les avions et planeurs qui lui sont donnés, prêtés ou vendus à des conditions exceptionnelles de propagande par le ministère de l'air. Elle bénéficie également par le ministère de l'air de dotations éventuelles gratuites ou à des prix très faibles, soit d'essence, soit en ravitaillement technique"…
Ils décrivent une réglementation assez précise, concernant la discipline de vol sur le terrain, domaine exclusif d'un "commissaire général de vol", ainsi que la délimitation des responsabilités dans les divers cas d'accidents envisageables.
Enfin, ils fixent le siège de l'association à l'Hôtel de Ville de Sainte-Geneviève-des-Bois (l'actuelle mairie, mise en service peu de temps auparavant le dépôts des statuts), la ville accordant au club l'usage d'un local au rez-de-chaussée de l'ancienne mairie, située au 220 route de Corbeil.
Compte tenu de sa localisation géographique, le club a toujours été handicapé dans la pratique des activités aériennes, en raison de l'éloignement des aérodromes praticables. Les premiers vols furent effectués à Orly, mais il n'existe aujourd'hui aucune archive connue permettant de connaître l'activité réalisée durant les deux années précédant la seconde guerre mondiale.

La guerre 1939/1945


Puis le club entre en hibernation jusqu'en 1941, époque à laquelle les associations changent de tutelle et sont rattachées au Commissariat Général à l'Education Générale et aux Sports, dépendant du ministère de l'Education Nationale. Il devient la Section Locale n° 20 des Sports Aériens, sous l'œil vigilant de l'occupant.
Durant cette période, qui s'étendra jusqu'en 1945, le vol à moteur fut interdit et le vol à voile très réduit et pratiqué seulement dans quelques centres, comme la Montagne Noire ou la Banne d'Ordanche. Les faibles moyens disponibles permettaient cependant à quelques planeurs d'avant-guerre d'effectuer des vols de pente, avec départs au sandow (tendu à bras d'hommes) et remontées au sommet par une paire de bœufs. En revanche, le "modèle réduit" fut très actif, car encouragé et aidé matériellement. Certes, les matériaux disponibles n'étaient pas les mieux adaptés, mais la construction de modèles en bois de peuplier, assemblés avec de la colle à la caséine (la colle "Certus") ou cellulosique et entoilés de papier, donnait une très bonne formation aux aéromodélistes et permettait de continuer de "voler" à moindre fais.
Durant toute la guerre, le club est présidé par Jean ILLES, le président d'honneur étant le célèbre avionneur Max HOLSTE, le secrétaire Guy MAREIGNER et le trésorier Jean LECOQ (bien connu des génovéfains). Affilié à la Ligue Aéronautique de France, il a organisé et participé à des concours de vol libre (planeurs, maquettes "Coupe d'Hiver", etc.), ainsi qu'à de très belles expositions au Parc de la Châtaigneraie et à l'Hôtel de Ville. Les vols de modèles réduits se déroulent alors à proximité, dans les champs situés après le bourg de Liers, ou plus rarement à la Ferté-Alais, car pour s'y rendre, il est nécessaire de prendre le train de Sainte-Geneviève-des-Bois jusqu'à Bouray-sur-Juine, puis de marcher 8 kilomètres jusqu'au plateau de Cerny, ce qui représente une épreuve pour les plus jeunes, sous-alimentés en ces temps difficiles.
Durant cette période, les techniques de construction et les connaissances aérodynamiques ont cependant beaucoup progressé, car de nombreux techniciens, ingénieurs et spécialistes de l'aviation se sont "réfugiés" aux Sports Aériens pour ne pas travailler en Allemagne ou en France au service de l'occupant.

L'après guerre


En 1944, beaucoup d'efforts et de privations doivent encore être consentis, avant que les génovéfains puissent songer aux loisirs (trois années plus tard, la ration quotidienne de pain sera encore limitée à 250 grammes par adulte et l'essence restera contingentée jusqu'en 1949…). Le club vit une période de flottement durant laquelle l'aéromodélisme survit tant bien que mal. Le vol à moteur et le vol à voile sont à réorganiser, d'autant qu'il y a peu de matériels en état.
Après le passage de quelques responsables éphémères, le club des Cigognes reprend corps avec le retour des rescapés de la guerre. Sous la direction de son nouveau président, compose alors de Robert DUC secrétaire, de sa mère (employée à Mairie) trésorière, de Roger GARRIGOU, modéliste depuis 1942 et animé de l'esprit de compétition. Le club reprend alors un bon régime de croisière malgré les séquelles de la guerre.
Le modélisme
La conduite de la section modèles réduits est confiée à SEGURENS, GRIVEAU, ainsi qu'à Roger GARRIGOU, constructeur prolifique en dépit de son jeune âge, qui pratiquera ensuite le vol à voile et le vol à moteur, en devenant l'une des "figures" les plus connues du club. Dans sa première année d'activité, la section parvient à réaliser une cinquantaine de planeurs et une dizaine de motomodèles en dépit des difficultés encore rencontrées pour se procurer matériaux et ingrédients de qualité (bois de balsa, papier Japon, colles et enduits de tension, caoutchouc…). Mais, après quelques déplacements initiaux en nombre lors des concours de planeurs de la région parisienne, l'élan retombe par manque de postulants autant que de matériels et d'outillages convenables, dans le local atelier de la route de Corbeil. Les modélistes expérimentés préfèrent alors construire chez eux, en quasi-indépendants. Au milieu des années cinquante, quelques modestes manifestations sont cependant organisées par le club. Notamment un concours de planeurs Série 2 Fédérale (dite des " Nordiques ", la plus accessible aux jeunes, avec des appareils limités à une surface alaire de 22 dm2, et une charge de 16 grammes par dm2, lancés à la main ou à la ficelle, le maximum de points étant atteint pour un vol de trois minutes…).

En 1950 Roger GARRIGOU démontre que les grands modèles ne datent pas d'aujourd'hui

Le Vol à Voile


Dès le redémarrage, la section Vol à Voile trouve la possibilité de voler au C.I.C. (Centre Inter Club regroupant les clubs de Pithiviers, d’Etampes, de Sceaux, d’Asnières et les Cigognes) d'Etampes-Mondésir. Les jeunes qui, pendant la guerre, avaient suivi les cours conduisant au Certificat puis au Brevet d'Etudes des Sports Aériens, peuvent y bénéficier d'un stage de cinq semaines. Les conditions matérielles y sont précaires. Un camp fait de tentes provenant des surplus de l'armée américaine est érigé à l'entrée Nord du terrain : grandes tentes dortoirs pour les stagiaires (équipées de châlits et de paillasses), tentes réserves de matériel, tentes ateliers...Les avions (NC 853, Morane 315, Tiger Moth, Stampe SV.4, Morane Saulnier MS.500) couchent à la belle étoile, sous bâche. Le chef de centre, BOYER, vit dans une tente plus petite (mais toujours "made in USA"), ainsi que les trois moniteurs : POIMULLE et son épouse, TOUZALIN et LEBOUCHER. Le mécano gardien, PETIT, qui essaie de maintenir l'ordre chez les stagiaires, n'est pas mieux loti…
Les planeurs, parqués à l'autre extrémité du terrain dans des hangars militaires, et quelques avions de chasse (Chasseurs Yak.9 du régiment Normandie-Niemen et Dewoitine D.520) volent très occasionnellement. Le Centre utilise deux Caudron C.800 pour l'école de début et un SG 38 (planeur "poutre" allemand sans cabine, où le pilote est entièrement à l'air libre) pour le lâcher et le Brevet B. Puis viennent les planeurs d'entraînement Nord 1300 et Arsenal SA.103 "Emouchet". Enfin, pour les "confirmés", le planeur de performance Nord 2000, dont chacun rêve…
Le centre possède également un planeur allemand " Kranich " (dont plus de 40 exemplaires avaient été récupérés par la France comme " prises de guerre "). La grande majorité des vols est accomplie par lancers au treuil Ford, dont les 2 câbles sont ensuite re-débobinés, en les tractant avec une Talbot dépouillée de sa carrosserie.


En 1947, au CIC d'ETAMPES, le jeune stagiaire Marcel FAGES sur la voiture de piste

En général, les stagiaires totalisent beaucoup plus d'heures de Talbot (et de ponçage de revêtement des C.800) que de vols d'école, la durée moyenne des vols treuillés étant de 3 à 4 minutes. Le dimanche, place aux "moustachus" qui s'offrent un coûteux remorquage. Parmi les pilotes les plus talentueux et titulaires du Brevet D, figurent Robert DUC et Roger GARRIGOU. Ce dernier complète sa formation par des stages aux centres nationaux de Saint-Auban sur Durance et de la Montagne Noire.


Jean-Claude FAVIER escalade le Tiger Moth

Mais par la suite, gênant les activités du Centre d'Essais en Vol (C.E.V.) sur le terrain de Brétigny, le C.I.C. d'Etampes doit se replier à la Ferté-Alais. Les activités y sont plus limitées, puis supprimées lorsque l'espace aérien de Brétigny (Zone 88) devient exclusivement réservé aux essais. Le C.I.C est alors transféré à Buno-Bonnevaux, dans le Gâtinais. Certains, comme Roger GARRIGOU, préfèreront aller voler au centre de vol à voile de Lognes-Emerainville, en Seine et Marne, avec André SUISSE comme moniteur. Puis le vol à voile disparut également de ce terrain, lorsque le plafond des vols autorisés fut fixé à 200 mètres au bénéfice de l'approche d'Orly.


Le Vol à Moteur


Après cinq années d'inactivité forcée durant la guerre, le vol à moteur suscite un engouement très fort, mais il est devenu beaucoup plus difficile à pratiquer en région parisienne. Car en 1950, l'urbanisation de la banlieue ne permet plus de réaliser le terrain de proximité envisagé lors de la création du Club, en lisière de Sainte-Geneviève-des-Bois, dans la plaine jouxtant Fleury-Mérogis.
Et l'aérodrome d'Orly, où l'aviation légère était pratiquée jusqu'en 1939, vient d'être restitué à l'aviation civile commerciale par l'Air Transport Command de l'US Army, avec les moyens radioélectriques installés dès son arrivée en août 1944. Le terrain est dorénavant réservé au transport aérien national et international, en développement rapide, grâce à l'emploi des avions militaires de surplus réaménagés (Douglas C-47 "Dakota" et DC4 "Skymaster", Junkers Ju 52...).
Le “Camp d'aviation” de Brétigny  est également inaccessible. Hâtivement réalisé en 1938 /39 pour accueillir en transit les avions neufs sortant d'usine, ainsi qu'une escadre de chasse opérationnelle, il a été doté en 1941 par la Luftwaffe de deux pistes bétonnées pour recevoir les bombardiers Junkers Ju 88, Heinkel He 111, ainsi que des chasseurs Messerschmitt Bf 109 et des avions de liaison comme le Bucker 182.  Puis à partir d’août 1944, plusieurs escadrons du Troop Carrier Command de l’USAF ont stationné durant une année, laissant volontiers les civils admirer les Curtiss P-47 “Thunderbolt”, Douglas C-47 “Dakota”,  B-26 “Marauder”, B-24 “Liberator” transformés en tankers... et récupérer occasionnellement les morceaux de Junkers Ju-88 en partie détruits lors du départ de la Luftwaffe. (Les “Cigogneaux” ne s'en sont pas privés). Et en août 1945, Brétigny est alors affecté à l'usage exclusif du Centre d'Essais en Vol.

Le président PIROU avec Roger GARRIGOU devant un MB 80

Fête de l'Air à Brétigny


La section vol à moteur des Cigognes ne peut donc redémarrer car elle n'a plus de terrain. Ses membres sont alors contraints de s’inscrire dans des clubs présents sur des terrains plus éloignés, distants d’une trentaine de kilomètres au minimum, et d’un accès malaisé par les transports en commun ou la bicyclette, que beaucoup sont encore contraints d’utiliser : Toussus-le-Noble, Buc, Guyancourt, Lognes...
Le matériel manque également, mais il en faut plus pour décourager des fanatiques. Des avions d' “avant guerre”, soit cachés, soit sans intérêt pour l'occupant, étaient remis en état. On vit donc sur les terrains des Caudron “Luciole”, “Phalène”, Potez 58... à côté d’avions d'amateurs nouvellement construits. Dans l'attente des avions neufs commandés par l'Etat, on se servit des avions américains et anglais des surplus militaires : Auster, Miles, De Havilland... de toutes versions disponibles. Mais surtout des Piper et Stinson, avions rustiques et fiables, équipés de moteurs tels que les Continental 65ch ou 90ch, qui s'imposeront pour un demi-siècle grâce à leur fiabilité, éliminant leurs rivaux dans une France qui ne peut leur opposer que les fragiles Minié Sous l'impulsion de l'Etat, la situation s'améliore cependant rapidement.
Si la mise en commande dès 1945 d'une petite série d'appareils conçus avant guerre (Mauboussin M.128 et M.129, Morane Saulnier MS.315) n'apporte qu'une aide provisoire, le choix du Stampe SV.4, équipé de l'honnête moteur Renault 4 Po de 140 chevaux et fabriqué à plus de 850 exemplaires, permet bientôt d'équiper pour une vingtaine d'années les Centres Nationaux et les Clubs avec un appareil aux qualités pédagogiques remarquables.
Parallèlement, le Service de la Formation Aéronautique du Ministère des Transports, tirant parti de l'extraordinaire activité des constructeurs amateurs (qui place alors la France en tête du développement de l'aviation légère en Europe) adapte la réglementation des épreuves à subir pour l'obtention du Certificat de Navigabilité Restreint d'Aéronefs. Il lance plusieurs concours pour le choix de biplaces écoles économiques et de remorqueurs de planeurs pouvant être produits en série. De remarquables machines  voient alors le jour: remorqueurs Boisavia B.60 dès 1946, Starck AS.70/71 en 1947… pendant que certaines firmes réalisent également des appareils débouchant sur une construction en petites séries: SIPA S.90, SNCAC NC.851, Gardan “Minicab”, Jodel D.112 et dérivés 117, 120, 140, précurseurs de la dynastie des Robin.
La section vol à moteur de l'Aéroclub des Cigognes, qui compte rapidement une dizaine de membres actifs, vit cette époque avec enthousiasme. Les plus acharnés d'entre eux, au premier rang desquels figure bientôt Jacques PIROU, vice-président et futur président de l'AIGLE, connaissent même dès le début des années 50, les délices de l'hélice à pas variable et du train d'atterrissage escamotable, sur l'élégant triplace “Norécrin”. Ce qui légitime leur action de prosélytisme comme la présentation durant plusieurs années d'un très beau stand lors de la foire commerciale de Sainte-Geneviève-des-Bois, où se mêlent modèles réduits et avions grandeur réelle, ceux-ci apportés de Lognes ou de Toussus le Noble par la route. Le CEV prêtera occasionnellement des hélicoptères arrivant par la voie des airs en dépoussiérant la place de l'Hôtel de ville à l'atterrissage. Notamment un “Djinn” piloté par FERRIGNO, membre du Club, et une “Alouette” pilotée par LAMONTAGNE.

Les meetings aériens sont initialement organisés dans les champs jouxtant la commune, puis sur l’aérodrome de Brétigny prêté par le CEV. Ils donnent lieu à des baptêmes de l'air, à des présentations d'avions civils et militaires, et a des séances de voltige, où l'on a vu évoluer Michel AMBROSI (champion de vol sur le dos) et l'ancien modéliste spécialiste des micro-modèles (aujourd'hui appelés cacahuètes) d'HUC DRESSLER, quelques semaines avant que la structure de son Druine “Turbulent” ne le trahisse définitivement.
Ces présentations sont effectuées à proximité des spectateurs, dans des conditions qui ne seraient plus tolérées maintenant. Les manifestations sont particulièrement prisées des jeunes comme des anciens et donnent au Club une image de réussite non usurpée, qui lui vaut d'intéressantes subventions et bourses de pilotage, ressources dont PIROU  s'occupe activement de faire bénéficier les jeunes, souvent au détriment de ses activités professionnelles de photographe.
L'accès aux stages du Centre Ecole de Début de Lognes (organisme du Service de la Formation Aéronautique, destiné à l’instruction accélérée de pilotes de planeurs par une accoutumance initiale particulièrement intéressante de 11 heures de vol sur Stampe) profite à beaucoup de membres, dont certains futurs pilotes professionnels civils et militaires, qui y accomplissent leurs débuts (entre autre un futur chef pilote du CEV). Citons PETIT, SALES, LECLERC, TINE (qui deviendra moniteur dans l’Armée de l’Air et périra dans un accident en vol), LEBAS et VIRETTO (devenus commandants de bord à Air- France).
En 1957, le Bureau du club se compose de : VOLATRON, Président ; PIROU, Adjoint ; DENJEAN, Secrétaire Général et FAGES, Trésorier.

Puis dans les années 60, VOLATRON passe la présidence à DENJEAN-MOUSTERY (radio-navigateur à l'UAT et pilote privé) et FAGES succède à Madame DUC à la trésorerie. Suit une période très active de la section Vol à Moteur, malgré la sophistication croissante des avions et le désengagement progressif de l'Etat (suppression de la prime au cheval/heure, de la détaxation de l'essence, et diminution des primes d'achat des matériels...). Mais grâce aux compétences de PIROU, devenu Président de l’ “AIGLE” (Association Inter Groupe de Lognes/Emerainville), le Club parvient à former sa meilleure section de vol à moteur. Puis, trois des cinq composants de l’ “AIGLE” abandonnent, les derniers partenaires des “Cigognes” restant les aéroclubs de Villeneuve-Saint-Georges et Saint-Maur.
PIROU obtient alors que le club rachète le titre de membre fondateur de l' “AIGLE”, le tiers du patrimoine et le tiers des membres lui étant affectés. Le personnel permanent est alors le suivant : un chef pilote (longtemps SUISSE, issu du CED), un moniteur adjoint, un mécanicien un peu plus tard, un secrétaire, ainsi que des moniteurs bénévoles, dont SOMBRUN, fidèle au poste le dimanche matin.
Le parc de matériel se chiffre à treize avions (début, perfectionnement et voyage), dont un Piper bimoteur. Avec PIROU, bien secondé par une sérieuse équipe des trois clubs, l'affaire tourne rondement et les finances sont saines. Mais une telle activité bénévole use son homme : le président démissionne au profit d'un plus jeune venant du club de Villeneuve. Puis l' “AIGLE” change de main et périclite : c'est la fin de la section Vol à Moteur de l’Aéroclub des Cigognes.

L’essor de l’Aéromodélisme


Dans le domaine de l'Aéromodélisme, le départ vers d'autres cieux de Roger GARRIGOU, ainsi que de nombre de ses amis, a provoqué une régression importante de la section. Les séances de construction au local du club ont disparu : il manque une tête à cette section. Pour tenter de stimuler les jeunes, et bien qu'il ait beaucoup d'occupations au sein du Club,  Jacques PIROU construit pour la Coupe annuelle des Maquettes de la revue "Modèle Réduit d'Avion", un Brochet MB.70 de 2 mètres d'envergure en vol libre, propulsé par un 3.36 cm3 “Ouragan”.
 En 1957, un premier concours de vol circulaire est organisé lors de l'inauguration de la piste que Jacques PIROU avait convaincu la municipalité de construire dans le parc de la Châtaigneraie.
C'est un succès d'affluence curieuse, malheureusement sans lendemain, devant la levée de boucliers des riverains que le bruit des moteurs à échappement libre des champions présents (JARRY-DELOGE, MAGNE et SOULIAC) horrifie à juste titre.

Dans le classement publié par le MRA (Modèle Réduit d’Avion), on trouve le nom de Jean-Claude FAYER, qui deviendra ingénieur navigant d’essais et un des grands responsables du Centre d'essais en vol à Brétigny (C.E.V). Mais malheureusement tout cela se termine très vite par  la fermeture des installations, sous la pression des riverains.
Hubert FREMINET (commandant de bord Air France) essaie de trouver un autre lieu dans les campagnes environnantes, mais l'indifférence des municipalités voisines pour cette activité fait que rien de concret ne voit le jour. Reste la petite équipe des débutants de la section modéliste, dont Jean-Claude FAYER s'occupe durant quelques mois. Elle est notamment constituée deMessieurs BOUFFARD, DI BERNARDO, RICHARD, ROBERT, et VIRETTO, mais est démotivée à la suite de ces péripéties.
Le Club a un peu plus de succès avec les cours de Préparation Militaire Air dont s'occupent Jean-Claude FAYER en 1957, GUYONNAUD et Marcel FAGES. La section Aéromodélisme éprouve des difficultés pour se développer jusqu'à ce que Marcel FAGES fasse connaissance en 1958 d'un jeune capitaine pilote d'essai du C.E.V., Francis PLESSIER, membre de l'A.F.A.T. (Association Française des Amateurs de Télécommande) et à la recherche d'une association expérimentée et sérieusement structurée. Cette rencontre permet de trouver un terrain d'évolution pour les modèles radiocommandés, sur l'emprise du C.E.V. Ce terrain, situé à proximité de la ferme de Bressonvilliers, est très facilement accessible mais ne peut être évidemment utilisé que les samedis, dimanches et jours fériés, compte tenu des activités aériennes du C.E.V. pendant la semaine. Puis dans les années 60, l'accès à ce terrain sera interdit et le club vivra d'expédient, volant sur des terrains prêtés ou  loués, en particulier : près de Liers (mais les membres rencontrent beaucoup de problèmes avec les chasseurs, ainsi Raymond WERLER a son avion mitraillé en vol) ou un peu plus tard dans une zone, alors en friche, qui deviendra la Moinerie à Brétigny.

Quelques concours sont organisés à cet endroit, mais très vite, il faut que le club cesse ses activités à cause de la construction d’une zone pavillonnaire.
Marcel FAGES, trésorier du club entre 1955 et 1965, succède en 1966 à DENJEAN à la présidence des “Cigognes”, avec Jacques LEBOURG comme secrétaire et Jacky DELCLOO comme trésorier. La même année, la création de la Fédération Française d’Aéro-Modélisme (FFAM), dont Marcel FAGES est l’un des membres fondateurs, allait changer la destinée de l’Aéroclub des Cigognes en le propulsant comme le club pilote de la radiocommande en France. Marcel Fages est administrateur à la Fédération, bientôt rejoint par Raymond WERLER comme membre du comité « Vol Télécommandé ».

En 1959,  le Perroquet signe son premier article dans le MRA, en fait,  sous ce pseudonyme, Francis PLESSIER se cache. Est ce pour ne pas gêner son statut de militaire, il y a tout lieu de le penser aujourd’hui ! Francis PLESSIER devient Le Perroquet pour de très nombreuses années, prenant en cela la succession de WASTABLE, lui aussi grand pionnier de la radiocommande en France. A partir de cette date, il devient la référence en radiocommande et ses nombreux articles seront attendus avec ferveur et assiduité par les amateurs d’aéromodèles radiocommandés.
Le 4 septembre 1960, le club organise, aidé puissamment par le C.E.V., son premier concours d’aéromodèles radiocommandés sur le terrain d'essais en vol, l’après-midi étant consacrée à des démonstrations. Les prémices du « Grand Cirque des Cigognes »  germent alors dans l’esprit fertile de Francis PLESSIER, d’autant qu’il revient d’un championnat du monde de voltige en Suisse sans aucun français. Il est un peu désespéré du niveau français, mais bien décidé à faire quelque chose ! Pourquoi pas une grande démonstration comme après ce championnat du monde ! Le 17 septembre 1961, le club renouvelle l'opération et organise la finale du concours national de Télécommande de la F.N.A (Fédération Nationale Aéronautique), l’après-midi de cette finale est évidemment consacré à une démonstration. Le Cirque prend naissance et l’on peut lire en 1962 dans le MRA un article dont le titre est « Le grand Cirque des Cigognes », la marque de fabrique est alors déposée pour 40 ans ! Cette année là, l’équipe belge, constituée de MM. PERRIGNON, DE DOBLELEER et  TEUWEN, fait sensation en voltige et tout particulièrement ce dernier par ses vols dos au ras du sol. Il y a aussi  COMPAIN avec ses jets à turbine (sans radio), DEVOISE avec son pulsoréacteur en vol circulaire et pour les Cigognes Albert DEJEAN et Francis PLESSIER qui font du spectacle dans une course poursuite, finissant par une grandiose collision ! Ainsi, le titre de Grand Cirque pour cette manifestation trouve désormais sa complète justification.
Côté compétition, le club commence à avoir d’excellents résultats. Ainsi au championnat de France de vol radiocommandé en 1962, le club enregistre 8 classés dont 4 podiums avec Jean CASSON qui remporte deux titres, Albert DEJEAN et Léon MARCUS. De son côté, Francis PLESSIER participe au second championnat du monde de voltige R/C à Kenley en Angleterre.
 En 1963, le Grand Cirque des Cigognes  prend son rythme de croisière et la presse modéliste est unanime pour saluer cette très belle démonstration de fin de saison.

Chris TEUWEN est toujours omniprésent avec une voltige un cran au dessus des autres, Jean CASSON et René NICOL font un simulacre de combat avec banderoles. Quant à Francis PLESSIER toujours très imaginatif, il fait la démonstration d’un vol circulaire radiocommandé à qui l’on coupe les câbles, avec la complicité involontaire d’une spectatrice. Francis LEFRANC, déguisé en clown, pilote son modèle juché sur un monocycle !

Le palmarès du club des Cigognes devient alors impressionnant par les résultats de ses membres aux championnats de France de vol radiocommandé, organisés entre 1964 et 1969 (à noter en 1966 la création de la FFAM). Le Club est classé premier chaque année et remporte le challenge « Vol Télécommandé», mis en jeu dés 1964 par le SFACT. La règle  voulant que lorsque ce challenge est gagné 3 fois par la même association, il lui est définitivement attribué. C’est ainsi que le club remporte définitivement les deux premiers challenges « Vol Télécommandé », correspondant respectivement aux années 1964, 1965 (Limoges avec 7 classés dont 3 podiums : Albert DEJEAN dans 2 catégories et Anh-Tuan PHAM dans une), 1966 (Rouen avec 7 classés dont 3 podiums :
 Alain CUZON, Jean ROUSSEAU et Anh-Tuan PHAM) et 1967 (Toulouse avec 9 classés dont 8 podiums : Jean ROUSSEAU avec 2 titres et 2 places de second, Gérard LEBAS - futur pilote de ligne – dans une catégorie, Raymond WERLER dans 2 catégories, Anh-Tuan PHAM et René NICOL, dans une catégorie), 1968 (Metz-Frescaty avec 11 classés dont 9 podiums et tous les titres de champion de France : Jean ROUSSEAU avec 3 titres, Raymond WERLER avec 1 titre et une place de second, René NICOL avec un titre, Claude LESEIGNEUR, Gérard LEBAS et Anh-Tuan PHAM), et 1969 (Châteauroux avec 6 classés dont 5 podiums : Jean ROUSSEAU avec 4 titres et Raymond WERLER).
 Ensuite une période moins brillante arrive sur le plan de la compétition et il faut attendre 1975 pour que le club renoue avec le succès et se voit à nouveau  décerné le fameux challenge 
 En 1964, le Grand Cirque voit le vol d’un engin extraordinaire, la brouette volante de GALLAND. Nul doute que Francis PLESSIER est totalement conquis par cette démonstration et cela  va générer chez lui le goût des engins bizarres non identifiés. En 1967, le Grand Cirque poursuit sa carrière de spectacle vedette de l’aéromodélisme. On y voit la première course aux pylônes avec Jean CASSON, Anh Tuan PHAM, Edouard MOLINARO (le cinéaste), PERRIN (le patron de la boutique BABY TRAIN), Pierre MAROT (le grand voltigeur français), René NICOL, Jean ROUSSEAU et bien sur Francis PLESSIER.

Egalement les premiers lâchés de ballons, la largage d’un planeur porté sur un avion, la grande maîtrise de Jean CASSON avec sa maquette du PT 19, les trois panneaux « STOP » de Marcel FAGES, Francis PLESSIER et de Jean ROUSSEAU et bien d’autres numéros tout aussi extraordinaires pour l’époque ! La télévision de l’époque se déplace quelques jours avant le cirque et passe une annonce le vendredi qui précède aux actualités régionales, assurant ainsi  une couverture médiatique de premier ordre et la venue de très nombreux spectateurs.
Le grand Cirque de 1968 est marqué par le vol du premier très gros modèle (3 m d’envergure, 2,80 m de long et 1,50 de haut, propulsé par un 10cc MERCO), l’incroyable BALEINE, construite par Jacky DELCLOO, Raymond WERLER et Francis PLESSIER, ce dernier pilotant ce modèle d’exception. On y voit également les modèles de vitesse des allemands BOSCH et surtout de KASEBERG, champion du monde en titre avec 320 Km/h. La foule par sa densité est évaluée a plus de 10 000 personnes (dixit le journal "Le Parisien"). La presse parle désormais du Cirque comme le plus grand propagateur du sport et de la technique radiomodéliste, donnant ainsi pleinement raison à la démarche de Francis PLESSIER, promouvoir tout en amusant.

La création du Challenge Michel BOUTELOUP, en mémoire d’un membre du club sympathique et souriant, toujours prêt à rendre service, décédé en 1967, a pour but de récompenser un membre ou une équipe, qui tout au long de l’année apporte son aide au plus grand nombre. Ce premier challenge est attribué à Jean ROUSSEAU.
Le Challenge Michel BOUTELOUP est attribué en 1969 à Francis PLESSIER. En mai 1969, un nouveau terrain est trouvé à proximité du CEV, dans la zone actuelle du ball-trap, juste en face de la Moinerie. Compte de la proximité immédiate du CEV, le club ne peut y voler que les samedis à partir de 14 heures et les dimanches de 10 heures jusqu’au coucher du soleil.

L’extension de la zone pavillonnaire de la Moinerie apporte une montée de protestations à cause du bruit provoqué par les modèles et ceci malgré la création du CD 119, qui sépare désormais le terrain de vol des habitations.
Le grand Cirque en 1969 attire toujours autant de monde et la presse parle d’une revue de saison où l’on mesure le chemin parcouru par la radiocommande. En effet, les aéromodélistes viennent des quatre coins de la France pour découvrir les dernières nouveautés, c’est le salon de la maquette avant l’heure. Les numéros principaux de cette année là, qui est marquée par l’absence de grosses vedettes, sont : la Baleine qui a donné naissance à quelques baleineaux assez terribles à tenir en l’air, une cigogne gonflable remorquée, un vol de groupe réussi des deux biplans de CHABERT et de ROUSSEAU.